Nocturne dans la forêt de Fontainebleau

2019
Zhao Fei, Nocturne dans la forêt de Fontainebleau, 2019. Crayon sur papier. Série de deux dessins, dimension de chacune : hauteur 14 cm, largeur 55 cm.

Nocturne dans la forêt de Fontainebleau était une expérience plongée dans le noir intense de la nuit forestière. C’était une nuit en plein d’été, en 2019. Ayant la curiosité de découvrir les cavernes préhistoriques cachées dans la forêt de Fontainebleau et aussi dans la tentative de trouver les gravures rupestres, après une journée de randonnée, j’ai fait du camping sauvage dans la forêt pour pouvoir continuer l’enquête le lendemain. J’ai installé ma tente sous le plus grand arbre de toute la forêt avant que le crépuscule ne tombe. La nuit passée dans une forêt aussi dense que celle de Fontainebleau était complètement une autre expérience que celle dans la clairière dans la forêt de Saint-Germain-en-Laye. Les rayons de Soleil semblaient disparaître plus tôt et aussi plus rapidement à cause des arbres immenses tout autour, qui couvraient la terre de leur feuillage épais. Même dans la journée, faute de rayon solaire, le sentier forestier se noyait dans les gris sombres de nuances différentes, alors qu’à la tombée de la nuit, pendant très longtemps, j’avais l’impression que ces gris sombres pouvaient s’approcher infiniment du noir absolu. Cette transition graduelle de la lumière à l’obscurité me privait ainsi progressivement de la vision jusqu’à l’état aveugle, à la disparition même du contour de mes propres doigts. Sans lumière céleste provenant des astres lointains du fond du Cosmos, je me sentais dans un état « chaotique » : j’étais tombée dans un « trou noir » infini, la sensation de perdre la notion d’espace et du temps était devenue un tel mystère, chaotique et silencieux.

J’ai ainsi essayé de représenter par des dessins ce que j’avais expérimenté pour la première fois, ce « noir pur » qui était au degré le plus profond, une obscurité totale sans lumière du Ciel. J’ai compris quand j’étais sous l’abri d’un arbre géant de la forêt de Fontainebleau, j’étais aussi privée de la liaison avec le Ciel, sans doute parce que je me sentais au sein de la terre, couverte, voire enfermée, par les feuillages denses de la forêt. Cette fermeture m’a incité à comprendre, en revanche, que la forêt nocturne sans ouverture était une image par excellence du monde chaotique, tandis que la clairière dans la forêt était naturellement un espace ouvert au Ciel.